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dimanche 11 novembre 2012

JUSTES NOCES



Ils s’étaient levés plus tôt qu’en semaine, pourtant on était samedi, avaient passé du temps dans la salle de bains, après un bref petit déjeuner, leur ami coiffeur était venu à leur domicile parce que c’était plus pratique. « A tout à l’heure » avait dit l’homme aux ciseaux en partant. Ils avaient ensuite mis leurs tenues neuves, s’étaient délicatement parfumés et consultaient leurs montres toutes les deux minutes. Vers 9 heures 37 précises (l’un et l’autre avaient vérifié), on sonna à la porte d’entrée et la sœur de Michel entra. Elle les embrassa, joyeuse. Ils firent un dernier petit pipi avant de partir, fermèrent la porte après avoir vérifié que toutes les lumières étaient éteintes et confièrent les clés à leur sœur et belle-sœur qui aujourd’hui faisait office de chauffeur. La voiture avait été décorée de fleurs et de tulle après avoir été lavée le matin même.

Devant la mairie, les familles de Michel et Dominique, attendaient déjà les deux héros du jour. Les femmes arboraient des chapeaux à fleurs et des robes colorées, les hommes, pour la plupart, portaient un costume d’où dépassait une pochette blanche. Les amis, surtout les plus jeunes, avaient choisi des tenues plus fantaisistes et néanmoins convenables pour l’occasion. Quant aux enfants, dans leurs tenues blanches et vertes (ou bleues) qui ne tarderaient pas d’être tâchées, ils couraient dans tous les sens manifestant à leur manière l’euphorie générale. L’un d’entre eux était d’ores et déjà tombé dans la cour de la mairie et pleurait désormais alors que son genou saignait et que sa mère lui reprochait d’avoir déchiré sa chemisette qui d’ailleurs n’était plus rangée dans son pantalon.

Michel et Dominique entrèrent dans la cour de la mairie sous les applaudissements des amis et engagèrent la tournée des bisous de bonjour à la soixantaine de personnes présentes, ponctuant chaque salutation par des exclamations proportionnelles au plaisir de voir la personne saluée et s’étonnaient pour certains de ne pas les avoir revus depuis tout ce temps.
A l’appel d’un huissier, tous pénétrèrent bruyamment dans la mairie, en commentant telle statue ou telle tapisserie. « C’est vraiment beau » disaient les uns. « On sait où vont nos impôts » ironisaient les autres.

Les mariés s’installèrent au premier rang dans les deux fauteuils qui leur étaient manifestement destinés, leurs parents à leurs côtés et les témoins à côté des parents. Déjà, de nombreux photographes en herbe faisaient crépiter leur flash, certains avec des appareils photographiques sensu strictu, d’autres avec leur smartphone (anglicisme que l’on peut traduire par « ordinateur de poche accessoirement doté d’une fonction téléphone »).

C’est le maire adjoint aux personnes âgées qui officiait ce jour-là. Il souriait à son entrée dans la salle, fonction oblige, mais grimaça caricaturalement lorsqu’il prit conscience que le prénom Dominique pouvait être aussi bien porté par une femme que par un homme. Il se tournait vers la secrétaire de mairie et adressa un regard sévère à celle qui avait forcément vu et lu les extraits de naissances des nouveaux mariés qu’en privé il affublait volontiers des charmants quolibets de pédés, tapettes, tarlouzes, tafioles, fiottes ou pédales (mais moins souvent « pédales » car il pratiquait le cyclisme).

A la lecture des articles 212 à 215 du code civil, il écorna délibérément une partie de l’article 213 relative à l’éducation et l’avenir des enfants, c’eut été trop lui demander le même jour.

A nouveau les photographes s’agitaient lors de la signature des registres jusqu’à ce que la joyeuse foule sorte de la salle sous les rires, les applaudissements et les lancers de confettis.

Finalement pensa l’adjoint au maire, dans un mariage comme cela, personne n’ira faire de pronostics hasardeux sur l’état de grossesse de la mariée.

Et c’est bien la seule différence.



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