Dans cet autobus qui se dirigeait
vers le centre-ville, les conversations s’entremêlaient, s’entrechoquaient, se télescopaient,
pour ne plus former qu’un brouhaha inaudible.
Deux femmes âgées s’échangeaient
des nouvelles de leur santé respectives déclinantes, brocardant au passage l’inefficacité
des médicaments, voire même la complicité des médecins dans leur malheur.
Ici, deux hommes débattaient sur
la médiocrité de jeu du nouvel attaquant acheté à prix d’or par leur équipe de
football favorite, avant de dévier leur conversation sur le mariage des pédés
puis sur le fait qu’une dénommée « Marine » avait des couilles ce qui
ne pouvait être qu’une métaphore bien qu’il n’ait probablement pas ce mot au
registre de leur vocabulaire.
Devant, un homme d’une
cinquantaine d’année, lisait un journal au contenu politique qui n’allait pas
de concert avec la discussion des précédents passagers.
Au fond, quatre jeunes, bruyants,
commentaient grossièrement l’aspect physique de personnes de sexe opposée de
leur entourage en les classant en trois catégories : « trop bonne »,
« baisable » ou « boudin ». Hormis pour les jeunes filles
de la troisième catégorie, le classement s’accompagnait de commentaires sur la
façon dont ils espéraient les « prendre » voire les « démonter ».
Fort heureusement, le peu de finesse dans les propos laissait présager que les
projets de « prise » ou de « démontage » resteraient à l’état
de fantasme et, dans le meilleur des cas, ne saliraient que leurs draps.
Etranger à tout cela, un autre
écoutait une musique au moyen d’un appareil portable, deux oreillettes plantées
de chaque côté de la tête, et dont on ne distinguait qu’un grésillement
synthétique.
Un vieil homme, sans doute le
plus âgé de l’autobus, regardait à travers la vitre sans se soucier des autres
passagers.
Une femme lisait un livre.
La conversation la plus
surprenante fut celle de deux jeunes femmes, à peine plus âgées que les
trublions du fonds de l’autobus, échangeant à voix presque basse (mais
néanmoins audible pour qui y prêtait attention) leurs expériences en matière de
soin du corps et en particularité sur le sujet de l’épilation pubienne,
élargissant la discussion au même thème sur la chose mâle.
Hélas, l’auteur, arrivé à
destination, descendit de l’autobus sans être en mesure de faire un compte
rendu à ses lecteurs.
Ah ! Très joli Antoine. Si la vie t'a vraiment présenté tout cela dans le même emballage-bus, remercions-la. Si tu as collé des morceaux de plusieurs voyages, c'est toi qu'on remercie. Pour l'écriture, je n'ose te féliciter de peur de ne rien t'apprendre.
RépondreSupprimerOn n'a l'impression d'être à ta place..
RépondreSupprimerHelyette.
Moi qui n'aime pas les transports en commun, j'ai adoré ce texte. J'imagine combien je dois me fermer quand je rentre dans un bus pour ne pas voir tout ça.
RépondreSupprimerEt c'est joliment bien dit !
Des Cagnes/Passerelle SLV et A/R, c'est l'une des choses qui me manque de ma vie d'il y a quelques mois. (Enfin les jours où j'étais assis, cela va de soi).
RépondreSupprimerMais je ma paye de temps à autre un Cagnes/Nice, pour le plaisir...
Comme quoi dans ton autobus on parle ! dans le tram c'est plutôt le retour des zombies!! bravo pour le texte!
RépondreSupprimerÇa me rappelle quelques conversations volées ici ou là. Si joliment rassemblées c'est un plaisir. Même si in fine c'est un peu consternant...
RépondreSupprimerExcellent reportage ! un véritable concentré de l'essence du moment ! Merci Antoine, ce fut savoureux !
RépondreSupprimerAmitié
@+ michelle
Tres interesant et apprecie, votre utilisation d'un poesie dans une activite qu'on fait quotidienement est genial. voila qui me donne une idea de faire une location autobus en place de voiture regulier (je rigole ;-))
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